Vendredi 07 Octobre 2022
Publication générale
L'obligation d'honnêteté du vendeur dans sa déclaration
Quels sont les recours disponibles pour un acheteur lorsqu’une vente a été faite sans garantie légale et qu’un vice est découvert par la suite et qui semblait être connu du vendeur?
Depuis plusieurs années, le secteur de l'immobilier expérimente un tel essor que certains acheteurs sont désormais amenés à consentir à des compromis pour acquérir la propriété rêvée. De ce fait, les vendeurs saisissent l'opportunité d’exclure la garantie légale au moment de la signature de l'acte de vente. Les clauses visant à décharger totalement ou partiellement le vendeur d’obligations en lien avec la garantie sont alors très fréquentes. On prive, ainsi, les acheteurs d'une protection inhérente au contrat de vente.
Néanmoins, le vendeur ne peut exonérer son entière responsabilité alors que ce dernier était, entre autres, bien conscient de la présence du défaut affectant son immeuble et aurait délibérément omis de le signaler pour éviter de faire fuir son acheteur. Dans certains cas, la législation prévoit des dispositions permettant d'invalider les clauses de non-responsabilité et d’écart de garantie légale.
- Le dol du vendeur
Dans une situation où une clause prive l'acheteur de la totalité des garanties légales, celui-ci peut, tout de même, se prévaloir du vice de consentement pour intenter un recours contre le vendeur.
Récemment, la Cour supérieure s'est penchée sur l'application de ce recours quand un vendeur masque certaines informations essentielles. Dans cette affaire, le tribunal a précisé que le vendeur doit honorer son devoir d'honnêteté et de loyauté dans les déclarations qu'il fait auprès de l'acheteur, à défaut duquel il pourrait être poursuivi pour dol. Il est à noter que ce devoir s'étend jusqu'à des réticences ou omissions volontaires de la part du vendeur, qui souhaiterait dissimuler des renseignements pour tromper intentionnellement l'acheteur.
Pour autant qu'il soit établi que les propos mensongers ou le silence était délibéré et exerçait une réelle influence sur son achat, la responsabilité du vendeur peut être engagée.
- Le vendeur qui tente de s’exclure de son fait personnel
Bien qu'une clause d'exclusion de garantie figure au contrat de vente, elle ne peut être invoquée si le défaut émane des gestes ou actes provenant directement du vendeur. La seule façon qu’un vendeur peut écarter sa responsabilité à l’égard d’un tel vice est simple : la dénoncer.
En 2012, la Cour supérieure s’est prononcée sur l’application de la règle en matière de garantie du droit de propriété. Dans cette affaire, le tribunal soutient que la vente sans garantie légale connaît une exception : le fait personnel du vendeur. Ce dernier est tenu à l’égard d'un droit, d'un empiétement ou d'un fait qui constitue un vice dans la propriété ou qui affecte l'exercice du droit de propriété de l'acheteur et dont il n’a pas fait mention.
Par exemple, la vente d'un même immeuble à deux personnes différentes ou la création d'une servitude au profit d'un autre terrain et au détriment de l'acheteur.
- Le vendeur qui connaissait ou ne pouvait ignorer le vice
La loi prévoit que le vendeur qui n'a pas avisé l'acheteur des défauts qu'il connaissait ou ne pouvait ignorer ne peut se soustraire aux obligations de garantie du droit de propriété ou de qualité. Lorsqu'il s'agit d'une simple exclusion des garanties légales, la clause peut être écartée dès lors que le vendeur a masqué le vice. Tel serait le cas de celui, par exemple, qui ne dévoilerait pas les dégâts causés au sous-sol par un déversement d'hydrocarbures qu'il aurait lui-même dissimulé.
Le recours à ce principe se révèle intéressant dans le cas où la vente a été conclue par un vendeur professionnel, comme celui qui perçoit régulièrement des revenus de la vente immobilière. Dans un tel cas, on suppose qu'il avait connaissance du défaut ; il lui appartient donc de faire échec à cette présomption.
Cependant, il existe une exception avec la vente « aux risques et périls de l'acquéreur » effectuée par un vendeur non professionnel. Dans une telle situation, une poursuite ne sera possible que si l'acheteur arrive à prouver la faute intentionnelle ou lourde du vendeur.
Ainsi, on peut constater que l’exclusion de la garantie légale a tout de même des limites. Avant de consentir à une telle limitation de vos droits lors d’une transaction, n’hésitez pas à consulter un professionnel du droit pour en connaître plus spécifiquement les conséquences.
Me Sabrina Roy
Alepin Gauthier Avocats Inc.
Cette chronique contient de l’information juridique d’ordre général et ne devrait pas remplacer un conseil juridique auprès d’un avocat ou d’un notaire qui tiendra compte des particularités de votre situation.
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