Lundi 28 Février 2022
Publication générale
Perception des sommes suite au règlement d’un litige
Les jugements rendus en matière de litige ont fréquemment pour effet d’octroyer des sommes à une des parties. Qu’en est-il de la perception des sommes une fois le jugement rendu? Il va de soi que toute personne qui obtient gain de cause dans le cadre d’un litige et qui a droit de recevoir des sommes de la partie adverse souhaite être en mesure de les collecter. Qu’arrive-t-il dans le cas où le débiteur omet ou refuse de payer?
Quelles sont mes options ?
1. Saisie des revenus du débiteur
S’il est question d’une personne physique et que vous connaissez l’emploi du débiteur, il est possible de procéder à la saisie de la partie saisissable des revenus du débiteur auprès d’un tiers1. Pour ce faire, il y lieu de donner vos instructions à un huissier de justice qui déposera au greffe du tribunal un avis d’exécution2. Il fera parvenir une copie de cet avis, par poste recommandée ou par huissier, au débiteur et au tiers saisi.
2. Saisir des biens du débiteur
Vous ne pouvez pas entreprendre seul les procédures d’exécution forcée pour saisir des biens meubles du débiteur. Si vous souhaitez saisir son automobile récréative ou son compte dans une institution bancaire par exemple, vous pouvez faire une recherche sur le Registre des droits personnels et réels mobiliers (RDPRM) pour confirmer le droit de propriété du débiteur d’abord. Vous devez ensuite faire appel à un huissier pour le saisir3.
Mais qu’est-ce qui arrive si je ne sais pas quels biens les débiteurs possèdent et que j’ignore son emploi ou s’il a un compte bancaire?
Vous pouvez procéder par un interrogatoire après jugement, lequel est encadré par les articles 688 et 89 du Code de procédure civile4.
Le créancier qui a eu gain de cause ou l’huissier « peut interroger le débiteur sur ses revenus, sur les sommes qui lui sont dues, sur ses obligations et ses dettes, sur tous les biens qu’il possède ou qu’il a possédés depuis la naissance de la créance qui a donné lieu au jugement et sur les biens visés par le jugement », de même que de requérir la communication de document5.
Le créancier peut même interroger une tierce personne, comme un responsable d’une institution bancaire, par exemple, afin de recueillir des informations sur le patrimoine du débiteur. Si le débiteur ne consent pas à l’interrogatoire, il lui faut, pour y procéder, obtenir l’autorisation du tribunal.
Toute difficulté qui surgit au cours de l’interrogatoire après jugement est soumise aussitôt que possible au tribunal pour décision.
À qui incombe la responsabilité de payer les honoraires d’huissier relié à la saisie?
Les honoraires de l'huissier sont à la charge du débiteur, dans les limites prévues par la loi, et seront déduits des montants résultant de la saisie. Notez donc que vous seriez appelé à devancer les honoraires d’huissier6.
Comment est-ce qu’un débiteur pourrait contester la saisie?
Le débiteur peut s'opposer à l'exécution forcée, selon le cas, par exemple pour la faire annuler ou y retirer une partie des biens que l'huissier s'apprête à saisir.
En effet, les biens qui ont le bénéfice d’insaisissabilité sont énoncés aux articles 694 et suivant du Code de procédure civile7. Sont notamment insaisissables les meubles de sa résidence principale, les instruments de travail, la nourriture, les combustibles, les vêtements nécessaires à la vie, les biens nécessaires pour pallier un handicap ou soigner une maladie, le tout, jusqu’à concurrence d’une valeur marchande de 7 000 $.
De plus, un véhicule automobile de promenade ne peut être saisi s’il est :
- nécessaire au maintien du revenu du travail ou d’une démarche active en vue d’occuper un emploi
- nécessaire pour assurer la subsistance, les soins requis par l’état de santé ou l’éducation du débiteur ou des personnes à sa charge.
L’article précise néanmoins que « l’huissier peut le saisir s’il estime que le débiteur peut assurer ses déplacements essentiels à l’aide du transport en commun ou par l’accès qu’il a à un autre véhicule ou à un véhicule de remplacement de moindre valeur ».
Si le débiteur souhaite invoquer un motif à savoir que l’huissier aurait saisi un bien insaisissable en vertu de ces articles, il appartiendra alors à la Cour du Québec de se prononcer sur le bien-fondé de l'opposition.
Me Franco Tamburro
Avec la
collaboration de Me Xuzhi Liang
Alepin Gauthier Avocats Inc.
Cette chronique contient de l'information juridique d'ordre général et ne devrait pas remplacer un conseil juridique auprès d'un avocat ou d’un notaire qui tiendra compte des particularités de votre situation.
[1] Pour la détermination de la partie saisissable des revenus, voir Code de procédure civile, RLRQ c C-25.01, art. 698 et 699.
[2] Code de procédure civile, RLRQ c C-25.01, art. 681 et 682.
[3] Code de procédure civile, RLRQ c C-25.01, art. 680.
[4] Code de procédure civile, RLRQ c C-25.01, art. 688 à 689.
[5] Code de procédure civile, RLRQ c C-25.01, art. 688.
[6] Code de procédure civile, RLRQ c C-25.01, art. 680 al.3.