Prestation Canadienne d’Urgence : Des conséquences fiscales à prévoir
Lundi 25 Mai 2020
Publication générale
Nul besoin de le rappeler, la maladie à coronavirus a engendré au Canada et dans le monde une situation sans précédent. À circonstances exceptionnelles, réactions exceptionnelles : Le gouvernement fédéral a mis en place diverses mesures pour protéger la population et venir en aide aux particuliers et aux entreprises, qui éprouvent des difficultés en raison de l’éclosion de la maladie. La prestation canadienne d’urgence (PCU) est l’une d’elles.
La PCU vise à fournir un soutien aux travailleurs admissibles qui ont subi une perte de revenu à cause de la Covid-19, en leur accordant un revenu de 500$ par semaine pendant un maximum de 16 semaines. Voyons les critères d’admissibilité et les impacts fiscaux à prévoir pour les personnes qui l’auront reçu.
Les conditions d’admissibilité :
De façon générale, pour être admissible à la PCU, la personne qui en fait la demande doit :
- Vivre au Canada et avoir 15 ans ou plus au moment de la demande ;
- Avoir cessé de travailler en raison de la COVID-19 ou être admissible aux prestations régulières ou de maladie de l’assurance-emploi, ou avoir épuisé ses prestations d’assurance-emploi ou les prestations de pêcheur de l'assurance-emploi durant la période du 29 décembre 2019 au 3 octobre 2020;
- Ne pas avoir quitté son travail volontairement ;
- Avoir gagné un revenu d’emploi ou un revenu de travail indépendant d’au moins 5 000 $ en 2019 ou dans les 12 mois précédant la date de la demande;
De plus, la personne qui présente une demande ne doit pas s’attendre à gagner plus de 1 000 $ au cours de la période de 4 semaines pour laquelle la demande est présentée.
Les conséquences fiscales à prévoir
Pas de retenue à la source
La PCU est un revenu imposable. Cependant, contrairement à la paie régulière que reçoit un salarié, la retenue d’impôt n’est pas faite à la source. Chaque demandeur devra donc rajouter le montant de cette prestation dans sa déclaration de revenu pour l’année 2020. C’est à ce moment-là que l’impôt à payer sur ce revenu sera calculé selon le taux d’imposition du particulier. Les contribuables n’ayant pas prévu la part du fisc pourraient alors être désagréablement surpris.
Il serait donc judicieux pour les personnes qui reçoivent cette prestation de mettre de l’argent de côté pour le paiement d’impôts futurs.
Les vérifications fiscales
Par ailleurs, il est à prévoir qu’un travail de vérification sera mis sur pied par l’Agence du revenu du Canada pour identifier les contribuables ayant reçu des montants de PCU alors qu’ils n’y avaient pas droit.
En effet, de nombreuses critiques sont déjà adressées au gouvernement quant à la facilité d’accès de la prestation, l’absence totale de vérification avant son versement et les nombreux abus constatés.
Interrogé à cet effet, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a indiqué lors de son point de presse quotidien du jeudi 14 mai que la priorité du gouvernement lors de la mise en place de cette mesure était de distribuer cette aide rapidement à la grande majorité des personnes qui en avaient réellement besoin, une vérification complète en amont aurait considérablement ralenti le processus. Il a toutefois précisé que des mesures pour contrer la fraude étaient mises en place.
Dans ce sens, l’ARC procède désormais à une vérification automatique mineure de chaque demande de PCU reçue pour s’assurer qu’aucune demande n’est présentée au nom d’une personne décédée, par une personne âgée de moins de 15 ans ou encore incarcérée dans un pénitencier fédéral.
Des vérifications plus poussées seront effectuées à postériori. Dans cet objectif, les employeurs devront fournir à l’ARC des données mensuelles sur le montant des salaires versés à leurs employés et non des relevés annuels comme c’est le cas habituellement.
Les autorités fiscales auront ainsi beaucoup plus d’informations leur permettant de vérifier que les conditions d’admissibilité ont été respectées
Les sanctions
Aucune sanction spéciale n’est prévue pour le moment pour les personnes qui toucheraient la PCU en étant conscientes qu’elles n’y ont pas droit.
Néanmoins en s’appuyant sur les dispositions actuelles de la Loi de l’impôt sur le revenu, l’article 239 pourrait s’appliquer dans le cas d’une demande de prestation frauduleuse.
Dans un tel cas, la personne ayant présenté une demande de prestation frauduleuse et reconnue coupable en vertu de cet article encourrait des pénalités pouvant aller jusqu’à 200 % du montant réclamé frauduleusement et un emprisonnement maximal de cinq ans.
Cependant, la position actuelle de L’ARC est de ne pas appliquer de pénalités ni d’intérêts aux demandeurs non admissibles ayant agi de bonne foi. Ces derniers devront cependant rembourser les montants perçus en trop.
D’ailleurs, l’ARC offre désormais la possibilité de rembourser la PCU en quelques clics à partir du service « Mon dossier » disponible sur son site internet. Toutes les personnes ayant perçu la PCU alors qu’elles n’y avaient pas droit ou celles ayant reçu pour la même période à la fois la PCU de Service Canada et de l’ARC, sont invitées à rembourser le trop-perçu.
Les directives entourant les programmes d’aide du gouvernement fédéral évoluent rapidement. De l’aveu du premier ministre lui-même, il est probable que la PCU, jugée trop généreuse par certains, soit modifiée prochainement pour s’adapter à l’évolution de la situation et dans le but d’encourager les Canadiens à retourner au travail.
Me Véronique Armelle Kuemo, avocate
Alepin Gauthier Avocats inc.
Cette chronique contient de l'information juridique d'ordre général et ne devrait pas remplacer un conseil juridique auprès d'un avocat qui tiendra compte des particularités de votre situation.